Il faut voir les 7 panneaux de Cédric Fargues comme on lirait une formule sacrée, avec l’intelligence du cœur. Notre œil est convié à déchiffrer la syntaxe incantatoire et cathartique d’une révolte pure où la mystique est ouverte sur la rue et le street-art retourné dans l’intériorité mystique.
On découvre les 7 panneaux, accrochés sur les murs de la salle, en circulant autour de cette prière écrite sur le rouleau de la loi de la non-loi. Chacun pourra l’épeler librement, à partir du panneau Macrotte qui vous accueille à l’entrée ; ensuite vous opterez, selon votre libre choix, pour le sens sinistrogyre ou dextrogyre – car cette phrase est un palindrome et peut-être est-ce un nom.
Voici donc Macrotte : les trois mouches qui volètent autour de sa tête coiffée d’un turban de merde le désignent comme le démon Belzébuth, le seigneur des mouches, le grand mamamouchi de l’oligarchie – car, aussi chic se croit-elle, l’oligarchie chie.
Avec son losange frontal formé des yeux de tous les gilets jaunes énucléés par les tirs de LBD, sa petite moustache hitlérienne, Macrotte tient à bout de bras la grande faux qui coupe les têtes et sème la mort. Il est borgne puisque, selon la grande prophétie, l’antéchrist sera borgne.
Le jaune d’œuf du gilet emblématique vous renverra au sacré-coeur de Marguerite-Marie Alacoque, la mystique de Paray-le-Monial, de ce cœur enflammé qui aurait dû être consacré à la France. La cour était à Versailles, le cœur était à Paray. Le Roi-Soleil choisit de rester côté cour et se refusa d’obéir à la demande du Christ. Aujourd’hui, la désobéissance civile doit se résoudre dans l’obéissance mystique. Cédric Fargues dénonce la trahison du roi Macron, l’orgueil de ce pouvoir qui se détourne de l’amour du pauvre des pauvres. La guillotine lui est-elle promise comme une réitération rituélique ?
Le gilet jaune est le contre-uniforme de la transverbération et de l’ensoleillement de l’âme communautaire. L’artiste doit rester relié au peuple car c’est en lui que réside l’esprit d’enfance, cet enracinement qui verticalise la vie et que la faux de la mort voudrait trancher à la racine.
Libérée de l’inflation graffitique qui recouvre les murs de la capitale et des grandes métropoles de France, l’exposition de Cédric Fargues, sise à Figeac, retrouve le rayon jaune du grand dieu solaire celtibère.
Alain Santacreu, le 22 mars 2019
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Cédric Fargues vit à Figeac, où il est né en 1988. Il a récemment participé aux expositions suivantes : Who Cares ? (New Galerie, Paris), Paradise (Queer Thoughts, New York), Yummy Yummy (Flatland Gallery, Amsterdam).